Défenseur du droit – campus 2011 – compte rendu

COMPTE RENDU DE LA FORMATION DELIVREE A L’UNESCO LE 12 JUILLET 2011 LORS DES JOURNEES CAMPUS SUR LE THEME :

« LE DEFENSEUR DES DROITS, UNE INSTITUTION NOUVELLE EXPLIQUEE AUX AVOCATS »

 

Campus 2011, deuxième jour : il est 14h15 lorsque les derniers avocats venus assister à la formation entrent dans la salle pour s’installer autour des intervenants du début d’après-midi.

Maître Rabah HACHED, président de l’Association Barreau Pluriel et organisateur de la conférence du jour, les accueille et rappelle d’emblée pourquoi ils se sont tous réunis : débattre sur le Défenseur des droits, nouvelle institution regroupant en une seule, celles du Médiateur de la République institué par la loi du 3 juin 1973, du Défenseur des enfants issu de la loi du 6 mars 2000, de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) créée par la loi du 30 décembre 2004 et de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) née de la loi du 6 juin 2000.

Le sujet est important puisque ces quatre institutions représentaient un contentieux conséquent : on recense 80 000 saisines du Médiateur de la République, 10 000 pour la HALDE, 2000 pour le Défenseur des enfants et 2000 pour la CNDS.

Maître HACHED nous donne le programme de la formation : étudier la loi organique créant le Défenseur des droits, venant faire application de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 pour ainsi définir les prérogatives de cette nouvelle institution ; puis examiner comment s’articule son statut avec les fonctions de la justice et celles de l’avocat. Par exemple, l’article premier de la loi organique dispose que le Défenseur des droits sera nommé par décret en conseil des ministres (procédure de l’article 13 de la Constitution) ce qui n’est pas sans conséquence sur le caractère indépendant qu’est censé recouvrer l’institution.

Pour l’accompagner, sont présents :

–          Maître Justin KISSANGOULA, maître de conférences à l’Université Paris V et avocat à la Cour,

–          Maître Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, député de Lozère, rapporteur de la loi organique sur le Défenseur des droits et avocat à la Cour.

 

Maître Justin KISSANGOULA prend d’abord la parole. Il donne un aperçu détaillé des pouvoirs du Défenseur des droits en citant, dans la loi organique, les articles qui posent ses prérogatives dont il souligne l’étendue : la possibilité d’effectuer des vérifications inopinées sur place sans avoir à obtenir préalablement une autorisation de la part d’un juge (article 22 de la loi organique) ainsi que de se faire communiquer tout document ou témoignage qu’il estime utile, la personne visitée ayant l’obligation de fournir ces documents au Défenseur des droits au risque de voir celui-ci saisir le Juge des libertés et de la détention par référé (article 22) ; la capacité de saisir le Conseil d’Etat sur des questions d’interprétation, ou encore de procéder à une médiation (article 25), la faculté de proposer des améliorations aux textes de lois (article 32)…

L’intervenant remarque que ces pouvoirs sont importants, et que cela peut faire peur : alors que la loi organique place le Défenseur des droits au rang d’autorité constitutionnelle indépendante, le Conseil Constitutionnel le qualifie, lui, d’autorité administrative à compétence constitutionnelle ; par ailleurs, il se demande si l’efficacité du Défenseur des droits n’est pas menacée par la concurrence qu’il représente pour les magistrats, car il est, selon Maître KISSANGOULA, une véritable juridiction au sens du droit européen.

En tout état de cause, il reconnaît l’incroyable richesse juridique que représente le Défenseur des droits qu’il compare à un « trésor » pour les avocats qualifiés d’« aventuriers »puisqu’ils vont devoir apprendre à user de cet outil si précieux.

Il attire également l’attention des avocats sur un point important de la loi organique : son article 20 semble permettre au Défenseur des droits de passer outre le secret professionnel auquel est tenu l’avocat. Mais l’avocat pourra communiquer des documents avec l’accord de son client.

 

Vient ensuite l’intervention de Maître Pierre MOREL-A-L’HUISSIER dont le regard, en tant que rapporteur sur le projet de loi organique et le projet de loi donnant naissance au Défenseur des droits, est expert. Il raconte les démarches qu’il a entreprises en tant que rapporteur et le travail de négociation qu’il a accompli pendant les débats de l’Assemblée.

Il reprend ensuite la problématique du statut du Défenseur des droits en précisant qu’il n’est en aucun cas une juridiction puisqu’il ne rend pas de décision. Il constitue un « accompagnement » pour les victimes en émettant des avis et en saisissant les juridictions. La volonté du législateur a été de donner un pouvoir exorbitant à cette institution afin de garantir aux français une protection solide de leurs droits. Il insiste par ailleurs sur l’indépendance de l’institution à laquelle s’impose une obligation d’exclusivité, l’article 3 de la loi organique interdisant tout cumul de fonctions avec celle de Défenseur des droits et sur la gratuité de sa saisine (article 6) qui en facilite l’accès.

Pour le député, la loi organique marque la création d’un véritable Ombudsman national qui agit dans différents domaines : les champs de compétences recouverts par les quatre anciennes institutions sont divisés entre quatre collèges au sein même de l’institution du Défenseur des droits.

 

Les intervenants répondent alors aux interrogations de la salle. Certains membres de l’audience sont sceptiques quant à l’efficacité que pourra avoir le Défenseur des droits, d’autres sont plus pragmatiques et demandent quelle sera la procédure à suivre par l’avocat pour saisir le Défenseur des droits et avec quel budget il fonctionnera.

Les exposants se veulent rassurants et optimistes : tout trois s’accordent pour dire que le Défenseur des droits incarnera une aide extrêmement utile pour les avocats dans le traitement des affaires de discrimination et d’atteinte aux droits de l’enfant. Il est de ce fait important pour eux d’appréhender correctement l’institution.

 

La conférence se termine à 15h45 sur un sentiment collectif de découverte. Les intervenants ont su donner aux avocats présents les connaissances nécessaires à l’établissement d’une bonne relation avec le Défenseur des droits.